quinta-feira, 18 de junho de 2009

Se existe lição na história, é que a história nada ensina...aí temos a reencarnação de Chamberlain, etc.

Monde 18/06/2009 à 19h25

L'Iran a besoin des Etats-Unis, et vice-versa

DÉCRYPTAGE

Les puissances occidentales restent très prudentes face à la mobilisation de la jeunesse iranienne. Elles souhaitent surtout ne pas remettre en cause de futures négociations avec Téhéran.

3 réactions

SYLVAIN MOUILLARD

Face aux plus grandes manifestations qu'ait connu l'Iran depuis la révolution islamique de 1979, les puissances occidentales restent bien discrètes. La communauté internationale a choisi de s'en tenir à une prudente bienveillance à l'égard des manifestants iraniens. Par pragmatisme: la plupart des chancelleries souhaitent surtout ne pas rompre les liens avec l'Iran. D'autre part, un soutien ouvert à Moussavi serait un cadeau empoisonné. Explications.

Comment la communauté internationale a-t-elle réagi à la fraude électorale en Iran?

Joe Biden, le vice-président américain, a exprimé dès ce week-end de «vrais doutes» sur la victoire de Mahmoud Ahmadinejad. «Préoccupée», l'Union européenne s'est émue des «irrégularités présumées» au cours du scrutin, et des «violences» qui ont suivi. Dès lundi, Paris et Berlin ont adopté un ton plus dur en convoquant les ambassadeurs iraniens en poste pour dire leur inquiétude.

Le lendemain, Nicolas Sarkozy, depuis le Congo où il assistait aux obsèques d'Omar Bongo, a continué dans la même veine en estimant que l'ampleur de la tricherie était «proportionnelle à la violence de la réaction». Mahmoud Ahmadinejad, de son côté, a pu compter dès dimanche sur son fidèle Hugo Chavez. Mardi, le président iranien sortant est allé en Russie s'assurer du soutien de Moscou et de Pékin. Lors du sommet de l'Organisation de la coopération de Shanghaï, il a obtenu l'assurance que les deux superpuissances s'en tiendraient comme souvent à la neutralité et à une non-ingérence dans les affaires intérieures iraniennes.

Barack Obama a joué la prudence en estimant sur la chaîne CNBC que «la différence entre Ahmadinejad et Moussavi en terme de politique pourrait ne pas être aussi grande que ce qui a été dit». Une position complétée par son porte-parole Robert Gibbs: «Le président continuera à exprimer ces préoccupations en faisant en sorte de ne pas se mêler» des affaires intérieures iraniennes. Le Royaume-Uni, habituel soutien de Washington sur ce dossier, est resté sur la même ligne: «Nous n'allons pas nous retrouver dans une position où l'on pourra accuser les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne ou n'importe lequel des pays occidentaux de vouloir choisir le gouvernement iranien», a déclaré le ministre des Affaires étrangères David Miliband.

La communauté internationale a-t-elle une influence sur ce qui se passe en Iran?

Selon Thierry Coville, professeur à Negocia et chercheur associé de l'Iris, les manifestations en Iran sont une «affaire purement intérieure». Pour lui, les réactions des occidentaux, notamment, n'ont que peu d'impact. «La position de Barack Obama est très intelligente. S'il avait soutenu directement Moussavi, cela l'aurait délégitimé. Les partisans d'Ahmadinejad en auraient profité pour dire que Moussavi était à la solde des Américains. Dès qu'il y a un problème, les ultras y voient la main de l'Occident», complète-t-il.

Comment expliquer les différences de ton entre les Etats-Unis ou la Grande-Bretagne et la France?

«La France a moins d'intérêts que les Etats-Unis en Iran. Obama ne peut pas se permettre d'adopter une attitude très dure. Il a choisi une ligne, celle du dialogue avec Téhéran, et il doit s'y tenir en restant très précautionneux», explique Azadé Kian-Thiébaut, professeur à l'université Paris 7. «Les Etats-Unis ont besoin de l'Iran, notamment dans un rôle de stabilisateur par rapport à l'Afghanistan et l'Irak, mais aussi sur le dossier nucléaire», détaille la chercheuse. Pour Obama, il importe donc de ne pas insulter l'avenir et ses futurs interlocuteurs. La prudence est donc de mise en vue de ces prochaines négociations, d'autant plus que cette ligne met en difficulté les ultras iraniens. Le message de l'UE est plus direct selon Azadé Kian-Thiébaut: «Il s'agit de faire comprendre aux dirigeants iraniens que le coup d'Etat n'est pas acceptable. L'affaire doit se régler par les factions iraniennes au pouvoir, sans que la situation ne dégénère et que les Pasdarans n'interviennent».

De qui l'Iran a-t-il besoin?

Dans une situation économique précaire, avec une inflation galopante, l'Iran ne peut se passer des investissements étrangers, notamment dans le domaine pétrolier et gazier. Des gisements gaziers gigantesques ont récemment été découverts dans le golfe persique. La technologie occidentale semble nécessaire pour les exploiter. «Le régime iranien a besoin de plusieurs milliards d'investissements étrangers et de technologies pour éviter la désagrégation», ajoute Azadé Kian-Thiébaut. L'Iran a également pour objectif de devenir la grande puissance régionale: «Un pays qui prétend avoir du prestige ne peut être exclu de tout dialogue», note-t-elle.

Quel est le rôle de la Russie et de la Chine?

Durant le mandat de George Bush, l'Iran a engagé une diplomatie parallèle avec la Chine et la Russie. Téhéran souhaite «jouer sur deux tableaux, en tentant d'intégrer la conférence de Shanghai, sans couper les ponts avec les Etats-Unis», explique Azadé Kian-Thiébaut, qui relativise tout de même l'importance de Moscou et Pékin: «Si leurs intérêts sont en jeu, ils ne s'engageront pas pour l'Iran»